Nouvelles dispositions en matière de détachement de travailleurs

Depuis le 30 juillet 2020, du fait de la transposition de la directive UE 2018/957 du 28 juin 2018, de nouvelles règles encadrent le détachement de travailleurs en France, comme dans les autres Etats membres de l’Union européenne.

Ces règles concernent différentes matières :

  • l’extension du « Noyau dur » ;
  • l’application quasi-totale du Code du travail à partir du 13 ème mois de détachement ;
  • l’application renforcée du principe d’égalité de traitement aux salariés détachés ;
  • la consécration du principe « A travail égal, salaire égal » ;
  • Le renforcement des obligations pour les employeurs.

Extension du « noyau dur »

Les nouvelles règles consistent en l’élargissement de ce que l’on appelle le « noyau dur » qui est aujourd’hui applicable aux différents détachements en droit du travail et qui regroupe les différentes dispositions qui doivent impérativement être respectées durant la durée du détachement. Parmi ces règles, il est possible de trouver la rémunération minimale, la durée du travail et les congés payés notamment.

Depuis le 30 juillet 2020, et après un certain délai de détachement, il faudra appliquer le « noyau dur étendu » qui consiste en l’élargissement du « noyau dur » et des règles applicables aux salariés détachés.

Application du Code du travail au travailleur détaché à partir du 13ème mois de détachement

Deux périodes sont à distinguer :

  • du 1er au 12ème mois seules les dispositions du noyau dur s’appliquent ;
  • à compter du 13ème mois, l’ensemble du Code du travail trouver à s’appliquer. Il s’agit désormais d’un « noyau dur élargi ».

Ainsi, depuis le 30 juillet, à partir d’une durée de détachement de plus de 12 mois, les dispositions du « noyau dur étendu » doivent être appliquées.

La durée de détachement de 12 mois sera appréciée depuis le 30 juillet en tenant compte de la période de détachement déjà accomplie sur le territoire. En cas de remplacement d’un salarié détaché par un autre salarié détaché sur le même poste de travail, la durée de 12 mois est atteinte lorsque la durée cumulée du détachement des salariés se succédant sur le même poste de travail (même tâche au même endroit) est égale à 12 mois.

Il sera possible pour les employeurs de demander un délai de 6 mois supplémentaire avant d’appliquer ce principe. Les employeurs devront faire une déclaration motivée auprès du SIPSI avant d’atteindre la durée de 12 mois de détachement. Une flexibilité est accordée pour les détachements arrivés à 12 mois entre le 30 juillet 2020 et le 14 août, permettant aux employeurs de faire la demande d’extension de l’application du noyau dur avant le 30 août 2020.

Par conséquent, à partir du 13ème ou 19ème mois, ce sont les règles du droit du travail français dans son ensemble, sauf exceptions, qui s’appliqueront aux travailleurs détachés. Ces exceptions sont constituées des dispositions relatives à la conclusion et rupture du contrat de travail et aux retraites d’entreprise ainsi que l’obligation de non-concurrence.

 Application renforcée du principe d’égalité de traitement aux salariés détachés

Le « noyau dur étendu » mis en place avec la réforme implique notamment le respect du principe d’égalité de traitement.Le respect de ce principe  sera considéré et contrôlé par rapport au traitement des salariés détachés face à celui des salariés d’une société française embauchés dans la même branche d’activité. Les salariés détachés devront donc bénéficier des dispositions des conventions collectives étendues qui leur sont applicables du fait de leur activité en France comme ce qui était déjà applicable avant la transposition de ces nouvelles dispositions.

 

Consécration du principe « A travail égal, salaire égal »

Parmi les nouvelles règles applicables, il y a notamment celles liées à la rémunération. En effet, si auparavant les employés détachés devaient bénéficier d’un « salaire minimum [et] accessoires de salaire légalement ou conventionnellement fixés », aujourd’hui le terme de « rémunération » regroupe ceci et les primes conventionnelles de toute nature (sauf celles instituées par accord collectif d’entreprise). Il faudra tenir compte du montant brut total de la rémunération pour vérifier le respect du principe d’égalité.

De plus, le salarié détaché devra désormais bénéficier du remboursement des frais professionnels comme les frais de transport, d’hébergement et les repas qui font désormais partie du « noyau dur étendu ».

 

Renforcement des obligations pour les employeurs

Des modifications ont également eu lieu en termes de contrôle des employeurs. Il restera impératif d’effectuer une déclaration préalable de détachement sur le site du SIPSI sauf pour les détachements pour compte propre et les prestations de courte durée.

 

Obligations d’information

Deux obligations d’information distinctes sont mises en place :

  • lorsque l’entreprise utilisatrice sera établie hors de France, elle devra informer au préalable l’entreprise étrangère du détachement ainsi que des règles applicables dans cette situation (une liste sera établie à cet effet par arrêté ministériel). Elle devra justifier par tout moyen en cas de contrôle qu’elle a bien rempli cette obligation d’information préalable. La déclaration a priori est donc supprimée au profit d’une vérification a posteriori.
  • lorsque l’entreprise utilisatrice sera établie en France, elle devra informer directement l’entreprise étrangère des règles applicables aux détachés en matière de rémunération.

 

Sanctions

Les sanctions ont été revues à la hausse. L’entreprise utilisatrice étrangère se verra infliger une amende allant jusqu’à 4 000 € par salarié détaché (8 000 € en cas de récidive dans le délai de 2 ans) si elle ne démontre pas qu’elle a bien effectué les obligations d’information.

L’entreprise d’accueil devra également vérifier que l’entreprise d’origine respecte les dispositions applicables. Si après avoir été informée par l’inspection du travail, elle n’enjoint pas par écrit à l’entreprise étrangère de faire cesser la situation, il y aura solidarité financière entre l’entreprise d’accueil et celle d’origine en cas d’amende.

Les Direccte pourront également par exemple interdire une nouvelle prestation de service à une entreprise prise en défaut de paiement d’une amende administrative en matière de détachement, et ce, sans attendre la réalisation d’une nouvelle prestation.

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Le détachement des salariés étrangers en France

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Quels sont les autres impacts éventuels?

Ces changements n’auront aucune conséquence en matière de sécurité sociale ni en immigration, puisque ces règles relèvent uniquement du droit du travail.

Ainsi, les règles applicables dans ces matières ne changeront pas, notamment les durées maximales de détachement prévues par les règlements européens ou les conventions bilatérales de sécurité sociale ou encore la durée du titre de séjour « Salarié détaché ICT ».

Le détachement en mobilité internationale

Le ministère des solidarités et de la santé et le ministère du travail ont réalisé un guide juridique qui informe sur le droit du travail et le droit de la sécurité sociale à l’égard des salariés qui sont détachés, des employeurs qui détachent des salariés ainsi que des travailleurs indépendants qui partent travailler en Europe depuis la France ou en France depuis l’Europe.

Guide juridique de la mobilité des travailleurs en Europe