Le détachement des salariés étrangers en France

 

Le cabinet d’avocats EY France et le Welcome Office de Business France vous présentent les informations pratiques concernant le détachement des salariés étrangers en France

A l’occasion de transposition de la directive européenne 2018/957 en droit français, le Welcome Office et le cabinet EY France reviennent sur la réglementation du détachement en évolution constante.

La transposition de la directive européenne prévue le 30 juillet 2020 renforce les obligations des entreprises dans le cadre du détachement de collaborateurs étrangers en France.

Les nouveautés les plus importantes qui seront applicable dans le droit français seront les suivantes :

  • Les travailleurs détachés devront percevoir une rémunération égale à celle de collaborateurs locaux et non la rémunération minimum, « à travail égal, salaire égal » ;
  • Toutes les règles valables pour les travailleurs locaux (prime d’ancienneté, de pénibilité, treizième mois…) s’appliqueront aux détachés ;
  • Si en immigration la durée du détachement reste possible jusqu’à 36 mois maximum dans le cadre intra-groupe, en droit du travail le noyau dur ne s’appliquera que sur les 12 premiers mois.
    Un changement de régime avec une application du code du travail s’impose donc à compter du 13ème ou du 18ème mois de détachement pour tous les détachés en France.

Qu’est-ce que le détachement ?

 

Le détachement de travailleurs consiste en la possibilité, en tant qu’entreprise étrangère, d’envoyer des employés en France de manière temporaire pour effectuer une mission temporaire pour le compte de l’entreprise étrangère. L’employeur a plusieurs obligations à respecter avant la mission de son salarié, notamment en matière d’immigration, de droit du travail et de sécurité sociale. Le détachement répond à la condition du maintien du contrat de travail initial entre l’employeur et le salarié et à l’existence entre eux d’une relation de travail, caractérisée par le maintien du lien de subordination, le paiement de la rémunération et l’accomplissement d’un travail pour le compte de l’employeur (non pour le compte de l’entreprise française qui reçoit le salarié détaché). Le détachement d’un travailleur est constitué lorsque le salarié effectue habituellement son travail « hors du territoire national » pour un employeur établi hors du territoire national.

 

Cette notion de salarié détaché est aussi utilisée en droit de la sécurité sociale dans une acception un peu différente : le détachement en droit de la sécurité sociale permet à un salarié de ne pas être affilié au régime du pays dans lequel il travaille et donc de demeurer affilié au régime du pays dans lequel se trouve son employeur. Cette situation est temporaire et la durée du détachement est fixée par les règlements applicables au sein de l’Union Européenne et par les traités internationaux bilatéraux (entre deux Etats).

Quelles sont les formalités à accomplir pour le détachement de travailleurs ?

 

Dans l’objectif de simplifier les démarches à accomplir par l’employeur, les nouvelles règles françaises distinguent les détachements de courte et de longue durée. Jusqu’à présent, les mêmes règles concernaient ces deux situations. Désormais, les formalités de détachements de courte durée sont simplifiées facilitant considérablement la réalisation d’une mission qui doit être par essence rapide.

La déclaration préalable de détachement

Avant le début d’une prestation en France, l’employeur établi hors de France qui détache des salariés sur le territoire français doit transmettre une déclaration préalable de détachement à l’inspection du travail du lieu de réalisation de la prestation. Cette déclaration est dématérialisée.

 

Cette déclaration doit être réalisée avant le début de la prestation, par tout employeur étranger (européen ou état tiers) au travers du téléservice dédié, le SIPSI (disponible également en allemand, anglais, espagnol et italien).

Téléservice SIPSI

 

Une exception est introduite à l’obligation de déclaration pour les missions courtes ne dépassant pas 90 jours sur 12 mois consécutifs :

  • Les artistes* ;
  • Les sportifs, arbitres et membres de l’équipe d’encadrement des sportifs, délégués officiels rattachés à la pratique ou l’organisation ;
  • Les apprentis en mobilité temporaire dans une entreprise ou un établissement situé en France ;
  • Les professeurs et chercheurs dans le cadre de colloques, séminaires et manifestations scientifiques ainsi que les activités d’enseignement à titre occasionnel.

 

* Cette exemption concerne les domaines du spectacle vivant, de la production et diffusion cinématographique et audiovisuelle et de l’édition phonographique. Cette exemption exclut les activités de montage ou de démontage d’équipements ou d’installations provisoires, de restauration, de transport, de surveillance et de sécurité des sites.

L’obligation de désigner un représentant de l’employeur

L’employeur localisé à l’étranger doit désigner un représentant en France qui fera la liaison entre cet employeur et l’inspection du travail notamment.

La désignation du représentant est effectuée dans la déclaration préalable de détachement. Cette désignation doit couvrir l’intégralité de la période de détachement.

Le représentant accomplit les obligations de l’employeur, et notamment celle de conserver les documents relatifs au détachement qu’il tient à la disposition des agents de contrôle de l’Etat.

Pour les détachements de courte durée et les événements ponctuels concernant les artistes, sportifs, apprentis, enseignants, une exemption de désignation d’un représentant est prévue, en plus de l’exemption déclaration préalable de détachement.

Les facilités accordées pour un détachement pour compte propre

Lorsqu’il n’y a pas de contrat avec un destinataire de prestation en France et qu’un salarié est détaché par son employeur, il s’agit d’un détachement pour son propre compte. C’est par exemple le cas d’un journaliste travaillant pour un employeur à l’étranger qui viendrait couvrir un événement en France. Il ne vient pas pour répondre à une offre de prestation de services en France mais il vient pour son compte propre.

Désormais, dans ce cadre spécifique, l’employeur n’aura plus à faire une déclaration préalable de détachement ni à désigner un représentant en France.

Dans quel délai le représentant de l’employeur étranger doit il produire les documents demandés par les agents de contrôle ?

 

Un délai d’une durée maximale de 15 jours est mis en place en cas de contrôle par l’inspection du travail. Ainsi, lorsqu’un contrat commercial est signé entre le prestataire de services et le destinataire de la prestation, les documents suivants doivent être présentés à l’inspecteur de travail :

  • Autorisation de travail permettant d’exercer une activité salariée ;
  • Document attestant d’un examen médical ;
  • Fiches de paiement effectif du salaire ;
  • Relevé d’heures travaillées ;
  • Si la durée du détachement est supérieure ou égale à un mois, les bulletins de paie doivent comporter les mentions suivantes :
    • Salaire minimum (y compris les majorations pour les heures supplémentaires)
    • Période et horaires de travail auxquels se rapporte le salaire
    • Congés et jours fériés
    • Conditions d’assujettissement aux caisses de congés et intempéries
    • Intitulé de la convention collective de branche applicable au salarié
  • Si l’entreprise est établie dans un pays tiers à l’Union européenne, le document attestant de sa régularité au regard d’une convention de sécurité sociale ou de l’attestation de fourniture de déclaration sociale émanant de l’organisme de protection sociale français chargé du recouvrement des cotisations sociales (datant de moins de 6 mois) ;
  • Contrat de travail ;
  • Document attestant du droit applicable au contrat liant l’employeur et le destinataire de la prestation en France ;
  • Document attestant du nombre de contrats exécutés et du montant du chiffre d’affaires réalisé par l’employeur dans son pays d’établissement et sur le territoire national.

 

En l’absence de contrat commercial entre le prestataire et le destinataire, aucun délai n’est prévu pour présenter les documents ci-dessus. Cependant, un délai d’une durée maximale de 15 jours est autorisé pour les documents suivants :

  • Document attestant d’un examen médical ;
  • Si l’entreprise est en dehors de l’Union européenne, le document attestant de sa régularité au regard d’une convention de sécurité sociale ou de l’attestation de fourniture de déclaration sociale émanant de l’organisme de protection sociale français chargé du recouvrement des cotisations sociales (datant de moins de 6 mois) ;
  • Contrat de travail ;
  • Document attestant du droit applicable au contrat liant l’employeur et le destinataire de la prestation en France ;
  • Document attestant du nombre de contrats exécutés et du montant du chiffre d’affaires réalisé par l’employeur dans son pays d’établissement et sur le territoire national.

L’aménagement des exigences administratives

Certains aménagements sont prévus pour les entreprises détachant régulièrement des salariés dans la mesure où ces dernières sont respectueuses des principes essentiels du droit du travail.

Ainsi, les documents suivants peuvent être demandées par la DIRECCTE compétente par l’entreprise et ce, pour une durée d’un an (renouvelable) :

  • la déclaration préalable de détachement ;
  • la désignation du représentant ;
  • la traduction en langue française des documents à fournir à l’inspection du travail.

Les contrôles et les sanctions relatifs au détachement de travailleurs

De nouveaux moyens de contrôle sont prévus afin de faciliter la coopération avec les employeurs. De plus, certaines sanctions prévues en cas de non-respect aux règles relatives au détachement ont été modifiées et d’autres ont été ajoutées.

L’objectif consiste à perfectionner un dispositif de contrôle et de sanction et à l’adapter aux situations que rencontrent les agents de l’inspection afin de pouvoir couvrir toutes les situations. Ces mécanismes sont ainsi facilités dans le but de ne pas représenter un obstacle important aux entreprises respectueuses du droit du travail mais ils permettent également de pouvoir faire cesser rapidement des manquements.

 

Alisa Sakic Second, Chef Welcome Office, Business France
Anne-Elisabeth Combes, Avocat Associé, EY / Leader Employment & HR Law France
Spécialisé en Droit du Travail & de la Sécurité Sociale